NOTRE HISTOIRE

L’association OK’OC a été fondée le 8 septembre 1989 à Lafrançaise (Tarn-et-Garonne) par un groupe d’une douzaine de personnes dont une moitié habitaient la ville de Montauban, chef-lieu du département.

À l’origine de notre association, une double volonté : mieux faire connaître les cultures traditionnelles amérindiennes, leur histoire, leur mémoire vivante, leurs combats contemporains et éveiller les consciences autour du renouveau occitan. Car il y avait, et il y a toujours, urgence à faire vivre cette culture du Sud, à la réinventer pour qu’elle trouve toute sa place dans le monde d’aujourd’hui.

Cette rencontre entre deux héritages culturels, que tout semble opposer mais que beaucoup rapproche, est au cœur de notre démarche. Et elle prend racine dans un épisode méconnu, aussi bouleversant que authentique.

En novembre 1829, trois Indiens de la tribu Osage arrivent à Montauban, exténués. Parti du Havre deux ans plus tôt, ce petit groupe a erré à travers l’Europe, sans ressources ni repères. Grâce à l’élan de solidarité des Montalbanais, ils retrouveront enfin leur village du Kansas.

Pourquoi étaient-ils venus ? Que cherchaient-ils ? Que sont-ils devenus ? Pour comprendre, il faut remonter loin dans l’histoire de la Louisiane, cette colonie française en Amérique qui occupait la partie centrale des Etats-Unis, le tiers de la superficie actuelle

‎‎‎LA NOUVELLE FRANCE

En 1534, sous le règne de François 1er, Jacques Cartier prend possession du Canada. Avec Samuel Champlain, en 1608 durant le règne de Henri IV, la France en fait une colonie : la Nouvelle France. Aussitôt, le commerce lucratif de la fourrure s’impose. En effet, les poils de castors et autres animaux sauvages servent à fabriquer le feutre dont on fait les chapeaux que tout le monde porte, à cette époque, partout en Europe.

Les autochtones accueillent avec bienveillance les nouveaux arrivants, les aident à s’installer et partagent avec eux leur connaissance du pays. Ainsi, les Français vont apprendre des Indiens les techniques de chasse, de piégeage et de survie dans les immenses forêts d’Amérique. Les premiers trappeurs français, ceux que l’on appellera les coureurs des bois ou voyageurs, se dispersent dans la région des Grands Lacs et prennent contact avec de nouvelles tribus. Les négociants en pelleteries vont à leur tour inciter les Indiens à piéger toujours davantage d’animaux afin de satisfaire une demande croissante. Ce commerce se pratique sous la forme du troc. Les Français introduisent les instruments et outils en métal : couteaux, hachettes, aiguilles, récipients divers, mais aussi les perles de verre, les étoffes et les rubans.

Ce commerce met les Français en concurrence avec les Anglais, également implantés dans cette partie du monde. Il faut trouver de nouveaux marchés. On pense à la Chine. L’idée germe alors de traverser le continent américain d’est en ouest afin d’atteindre l’Océan Pacifique. Seule la voie fluviale est envisageable au travers de l’inextricable fouillis forestier qu’est alors l’Amérique.

L’EXPÉDITION MAQUETTE & JOLLIET

En 1673, le jésuite Jacques Marquette et l’explorateur Louis Jolliet partent en expédition depuis le lac Supérieur, espérant que le fleuve Mississippi mène vers l’ouest et se jette dans l’océan Pacifique. En descendant le fleuve à bord de deux canoës, ils cartographient les lieux, récoltent des plantes et rencontrent des tribus inconnues. Mais ils découvrent finalement que le Mississippi coule vers le sud, non vers l’ouest.

Arrivés à la rivière Arkansas, des Indiens Illinois leur apprennent que le fleuve se poursuit vers le sud-ouest, vers une région qu’ils appellent « Wha-Sha-She », que Marquette note comme « Osage ». Craignant de pénétrer en territoire espagnol, Marquette décide de rebrousser chemin et de retourner en Nouvelle-France.

LA LOUISIANE FRANÇAISE

En 1682, Robert Cavelier de La Salle, un explorateur français, reprend le parcours de Marquette et descend tout le Mississippi jusqu’au golfe du Mexique. Il est impressionné par l’immensité du territoire et le nomme « Louisiane » en l’honneur du roi Louis XIV, le Roi Soleil.

Ce territoire devient officiellement une colonie française, même si les populations locales comme les Wha-Sha-She (Osages) ne savent pas qu’elles sont désormais considérées comme sujets du roi de France.

 La Louisiane est immense, allant des Grands Lacs jusqu’au golfe du Mexique, et du Mississippi jusqu’aux Montagnes Rocheuses.

Mais en réalité, cette colonie est très difficile à contrôler : peu de soldats, beaucoup de coureurs des bois (aventuriers français), qui préfèrent la liberté, la nature, les échanges avec les Indiens et l’aventure plutôt que d’obéir à un roi lointain.

LES OSAGES

Les Osages sont une tribu amérindienne du sud, membres d’un groupe appelé Deghiha qui comprend aussi les Ponca, Omaha, Kaw (Kansas) et Quapaw (Arkansas). Ces tribus parlent des langues proches, partagent les mêmes traditions et ont toujours été alliées.

À l’époque de la colonie française de Louisiane, leur territoire de chasse était immense, comparable à la taille de la France, et couvrait aujourd’hui une partie du Missouri, Kansas, Oklahoma et Arkansas. Ils contrôlaient un endroit stratégique : le confluent du Missouri et du Mississippi, ce qui leur permettait de maîtriser les échanges commerciaux sur ces grands fleuves.

Les guerriers Osages étaient impressionnants, souvent très grands (2 mètres ou plus), musclés et tatoués. Ils portaient des colliers en os, des bracelets, des anneaux aux oreilles, et avaient une coiffure particulière avec une crête sur la tête ornée de plumes lors des cérémonies. Les femmes étaient aussi réputées pour leur beauté, vêtues de robes colorées et ornées de bijoux en os et coquillages.

Leur mode de vie combinait agriculture (principalement pratiquée par les femmes et enfants) et chasse (réservée aux hommes). Ils étaient semi-nomades : ils vivaient dans des villages près des rivières mais partaient deux fois par an pour des grandes chasses au bison. Le reste du temps, les chasseurs attrapaient d’autres animaux et pratiquaient la trappe (piégeage). Le commerce des peaux était important, et ils défendaient jalousement leur territoire, ce qui provoquait souvent des conflits, raids ou guerres pour voler chevaux, femmes ou capturer des esclaves.

Les Osages étaient de redoutables guerriers respectés. Les Français comprirent vite qu’ils devaient s’allier à eux pour contrôler la région. Les trappeurs français rendirent hommage aux Osages, surtout aux femmes, avec qui ils se marièrent souvent. Ces trappeurs adoptèrent leurs coutumes et eurent beaucoup d’enfants métis, dont les descendants portent encore des noms français comme Labadie ou Larose.

Enfin, Les Occitans ont laissé en Amérique de nombreuses traces de leur passage : la ville de St Louis, fondée par le Béarnais baron de Laclède ; la ville de Detroit, fondée par le Tarn-et-Garonnais sieur de Lamothe-Cadillac (et dont la marque Cadillac porte aujourd’hui le nom), la rivière Gasconnade et encore bien d’autres…

LA VENTE DE LA LOUISIANE

En 1803, Napoléon Bonaparte, alors Premier consul (pas encore empereur), veut financer ses ambitions en Europe. La colonie de Louisiane, trop loin, difficile à gérer et coûteuse en soldats, ne l’intéresse plus. Sur les conseils de Talleyrand, il propose de vendre la Louisiane aux États-Unis.

Le président américain Thomas Jefferson, ancien ambassadeur à Paris pendant la Révolution, est stupéfait par cette offre : pour 15 millions de dollars, il achète toute la Louisiane, doublant ainsi la taille du pays. Désormais, les États-Unis s’étendent jusqu’aux Montagnes Rocheuses.

Mais cette vente se fait sans consulter les populations locales. Les Indiens des Plaines, dont les Osages, deviennent américains sans le savoir. Et leurs descendants ne recevront la citoyenneté qu’en 1929 !

Les Français, n’étant plus présents dans la région, s’en désintéressent. Cela attriste certains Osages, qui étaient alliés avec eux. Un groupe d’Osages, mené par le chef Ki-He-Kah-Shinkah (« Petit-Chef »), décide alors de partir en France, comme s’ils allaient « rendre visite à leur tribu », marquant le début d’une grande aventure.